Un coefficient de 112, ça ne se refuse pas. Et puis, comme nous allons bientôt laisser la Bretagne et l’Océan, il fallait au matin aller humer l’air marin. Surtout, avant qu’il ne fasse trop chaud, je voulais conduire Monsieur Galou à « sa » plage. Car je sais que malgré la fatigue c’est un endroit qu’il aime…

Peu de plages pour les chiens dans le Morbihan
Il faut protéger les oiseaux qui nichent là au printemps : le fameux gravelot à collier interrompu. Certainement aussi se protéger d’autres nuisances que l’on devine. Jamais Galou ne s’oublierait dans le sable. Ça ne lui viendrait pas à l’esprit…
Le Morbihan, surtout côté Golfe, offre peu de plages aux chiens… en particulier l’été… En septembre, une fois les touristes partis c’est un rien plus facile…
Ici, du côté de Plouhinec, l’accès reste libre. Des chevaux viennent aussi parfois et leur galop est merveille à contempler.
Le passage dans les dunes qui s’effondrent appelle à rester sur les chemins. Des idiots évidemment ne veulent pas le comprendre…
Le Morbihan peine à se protéger. Le sud souffre, jouant les côtes d’Azur… tous ces merveilleux espaces sont en danger et le manque de moyens se fait sentir. On a trop construit, on continue. Les sentiers côtiers souffrent.
Cette plage, face à l’île de Groix, reste un des rares espaces ouverts, d’ailleurs modérément fréquenté. Et ces dernières années c’est devenu la plage de Galou, celle où il aime rêver en regardant les oiseaux, se gorger d’odeurs…
Il y a beaucoup joué, tirant des branches de bois flotté, courant après balles et ballons… se baignant parfois.
L’âge et l’arthrose venant, son pas est moins rapide, nous allons moins loin mais il aime être là. Il n’arrêtait pas de venir vers moi comme pour me remercier car cela faisait longtemps que nous n’étions pas venus…
L’incroyable Océan
Si je devais me donner des dieux, il y aurait l’Océan, la Montagne et la Forêt. Si je devais me donner des demi-dieux, il y aurait les rivières et les oiseaux.
Ce qui est extraordinaire, à chaque fois, même dans ces lieux que je connais par cœur, c’est le renouvellement de la surprise lorsque franchissant les dunes, traversant un chemin, tu le vois soudainement apparaître…
Qu’il surgisse derrière un rocher, un pan de paysage ou se détache du ciel, ce moment où tu vois « qu’il est là » me traverse à chaque fois d’émotions qui remontent à l’enfance… L’Océan !

L’Océan a cela de magique qu’il est à la fois consolateur, revigorant, lumineux, invite à l’exploration du Monde et effrayant, fort, puissant, mystérieux…
Il mêle les pulsions de vie et de joie, à la mort qu’il tient dans ses entrailles profondes. Il rejette des déchets qu’il a broyés, il souffre souvent mais il nous attire, marins, voyageurs, nageurs, oiseaux… Aimant…
Galou a appris peu à peu à évaluer les vagues : celles avec lesquelles il est possible de jouer, celles qui vont bousculer. Il a appris à aimer l’Océan aujourd’hui comme la neige hier…

Aujourd’hui sage et doux
Tranquille, doux, apaisant. L’Océan nous parlait avec une pointe de nostalgie. Nous reviendrons sûrement avant le « grand départ » – mais c’est finalement dans peu de temps- , peut-être un jour avec la casquette idiote du touriste… pour Galou, c’est un peu moins sûr …

Il aime tellement marcher au bord de l’eau… mais sur la plage, la fatigue vient vite. Parfois, une patte avant se dérobe, petit bug du cerveau. Il se relève, courageux avec une volonté ineffable de goûter le moment, de respirer…
Je suis épaté car au lieu de rechigner, se plaindre, jouer les vieux aigris, il développe en vieillissant une capacité à communiquer dans la tendresse, réclamant de plus en plus de caresses, mais en donnant… se montrant protecteur notamment avec les enfants, supportant de moins en moins la solitude mais toujours joueur… et indubitablement, il aime les beaux paysages.

Mine de rien, l’Océan comme Galou, me donnent des leçons de tendresse. Les émotions passent, me traversent…
L’autre jour, le jeune vétérinaire se montrait vraiment empathique. On craignait une tumeur. Les examens étaient bons. Il me rappela avec une véritable attention, pas excessive, mais montrant que le charisme du loulou ne touche pas que moi.
C’est étrange de se dire que je découvre toujours ce chien alors que je le connais depuis sa naissance, que je l’ai nourri au biberon et éduqué avec patience. Ce n’est pas un humain. Qu’on ne me prête pas des intentions idiotes. Mais il m’a appris aussi beaucoup à propos des humains…
Et je maintiens que non seulement c’est un être sensible, mais qu’il est capable d’humour, a le sens du jeu, de la poésie des paysages et des êtres. Il a appris comme moi à goûter le mystère de l’Océan…
Aux grandes marées
J’ai retrouvé ce texte, d’il ya quelques années, du temps du Finistère…
aux grandes marées d'été, les marais inondés je t'ai perdu dans les fondrières que l'eau efface mon orgueil sous le soleil la vague me tire et me mène chevilles ensablées aux grandes marées j'ai le coeur lavé un jour je comprendrai l'attraction, le flux et le reflux marées de vives eaux perte et renouveau à l'orée des grands fleuves se posent les oiseaux ton visage me reste caché Lune magnétique et sombre aux grandes marées je suis déboussolé